La Banque mondiale tire la sonnette d’alarme : face au resserrement des conditions de financement, un nombre croissant de pays en développement ont recours à des mécanismes d’emprunt hors budget et complexes, rendant l’évaluation de la dette publique de plus en plus difficile.
Dans son rapport intitulé Radical Debt Transparency, l’institution souligne que si la proportion de pays à faible revenu publiant certaines données sur la dette est passée de moins de 60 % à plus de 75 % depuis 2020, seulement un quart d’entre eux divulgue des informations détaillées sur les nouveaux prêts contractés. La multiplication des accords opaques — placements privés, swaps de banques centrales, transactions garanties — complique encore le suivi.
« Quand la dette cachée refait surface, le financement se tarit et les pays se tournent vers des opérations opaques et “collatéralisées”, explique Axel van Trotsenburg, directeur général senior de la Banque mondiale. Une transparence radicale est essentielle pour briser ce cercle vicieux. »
Le rapport pointe également les limites de la divulgation des dettes contractées au niveau national et dénonce des restructurations « silencieuses » qui privent les marchés d’informations essentielles.
Pour y remédier, le rapport recommande des mesures urgentes et structurantes :
- réformes juridiques et réglementaires imposant la transparence des contrats et des conditions d’emprunt ;
- participation des pays créanciers à des processus globaux de rapprochement des données ;
- audits réguliers et contrôle national renforcé ;
- publication des conditions de restructuration une fois les accords finalisés.
« La transparence de la dette n’est pas seulement technique, c’est une politique publique stratégique, souligne Pablo Saavedra, vice-président de la Banque mondiale pour le pôle Prospérité. Elle réduit les coûts d’emprunt et attire les investissements, stimulant la création d’emplois. »
Le rapport met en avant les initiatives phares de la Banque mondiale, notamment le programme d’assistance technique aux pays et le système mondial de notification des débiteurs, actuellement la principale source de données vérifiables sur la dette extérieure des pays à revenu faible et intermédiaire. Des projets sont en cours pour étendre ce système aux dettes intérieures et améliorer la qualité des données.
En résumé, la Banque mondiale appelle à une révolution de la transparence de la dette, considérée comme un levier stratégique pour la confiance financière, la stabilité économique et le développement durable dans les pays en développement.
El Faye