Trajectoire du peuple Lébou: Une odyssée racontée par Feu El Hadji Ngalla Guèye

Trajectoire du peuple Lébou: Une odyssée racontée par Feu El Hadji Ngalla Guèye

La salle Amady-Aly-Dieng de L’Harmattan Sénégal a vibré, samedi dernier, au rythme d’un retour aux sources. La maison d’édition Oxyzone y a présenté L’Odyssée du peuple Lébou, œuvre posthume de Feu El Hadji Ngalla Guèye (1950-2019), figure respectée de la tradition et fin connaisseur de l’histoire Lébou. Cet ouvrage de 208 pages, fruit de plus d’un demi-siècle de recherches, restitue la trajectoire de ce peuple installé sur la presqu’île du Cap-Vert, dont l’épopée plonge ses racines jusqu’en Mésopotamie.

« L’auteur a commencé ses recherches en 1964. Pendant plus de cinquante ans, il a collecté, interrogé et transmis une mémoire fragile, jusque-là essentiellement orale », a expliqué Alassane Diagne, transcripteur de l’œuvre. Selon lui, ce patient travail a permis de “sauver ce savoir” et de le fixer sur papier. Le récit retrace les différentes étapes de migration : de la Mésopotamie à l’Égypte ancienne, du Sahara vert aux empires du Ghana, du Mali, du Tekrour, puis du Djander, jusqu’à l’installation définitive au Cap-Vert. Sixième vague migratoire, le peuple Lébou est le seul à avoir choisi de rester sur cette presqu’île, donnant naissance à ce que l’auteur appelle la « République léboue ».

Ndakaaru, mystique et identité

Dans ses pages, l’ouvrage éclaire également la genèse de Dakar, « Ndakaaru », en présentant plusieurs versions de l’origine du toponyme : dëkaarlo (cohabiter), ndók nu aaru (vivre en paix et en sécurité), ou encore dëk aaru (pays refuge). La dimension mystique de la culture léboue y est largement évoquée, tout comme la présentation des villages fondateurs : Yoff, Ngor, Ouakam, Thiaroye, Yeumbeul, Sangalkam, Mbao, Dialaw, entre autres.

La cérémonie a été marquée par la présence du Grand Serigne de Dakar, Abdoulaye Makhtar Diop, qui a salué une « contribution majeure à la connaissance du peuple Lébou et, au-delà, du patrimoine sénégalais ». Selon lui, L’Odyssée du peuple Lébou illustre ce que Léopold Sédar Senghor appelait le « métissage culturel », rappelant la richesse née de la rencontre des histoires et des ethnies.

Même son de cloche du côté d’Alioune Ndoye, maire de Dakar-Plateau, qui a plaidé pour que l’ouvrage soit disponible dans les bibliothèques et écoles de sa municipalité : « Ce livre permet de répondre aux grandes questions : qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? En donnant aux jeunes générations des repères ancrés dans leur histoire. »

Entre mémoire et transmission

Pour le poète et écrivain Ndongo Mbaye, ce travail est « une saga patrimoniale, faite de péripéties et de récits fondateurs, que le transcripteur a su restituer avec rigueur ». L’éditrice Sokhna Benga a, pour sa part, rappelé que l’ouvrage a bénéficié du soutien du Fonds d’aide à l’édition du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Culture, et s’inscrit dans une collection dédiée aux textes qui rappellent l’importance de la mémoire historique.

En célébrant l’œuvre d’El Hadji Ngalla Guèye, disparu le 5 août 2019, L’Odyssée du peuple Lébou résonne comme une invitation à préserver la mémoire des peuples par l’écrit. Une façon de dire que l’histoire orale, aussi riche soit-elle, trouve dans le livre un espace de transmission pérenne, indispensable à la construction d’une identité collective.

El Faye

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