REPORTAGE – CONVOCATION DE FARBA NGOM: Une audition sous haute tension

REPORTAGE – CONVOCATION DE FARBA NGOM: Une audition sous haute tension

Hier, l’atmosphère était électrique sur l’avenue Cheikh Anta Diop de Dakar. Le dispositif policier n’est pas passé inaperçu. Des dizaines de policiers en tenue anti-émeute, appuyés par des véhicules blindés et des barrières de sécurité́, encadrent les abords des locaux du Pool judiciaire et financier (PJF) où Farba Ngom est convoqué́. Son audition, très attendue a suscité des réactions vives, aussi bien parmi ses partisans que chez certains citoyens qui voient en cette convocation un tournant dans la lutte contre l’impunité́.

En cette matinée de jeudi 27 février 2025, l’avenue Cheikh Anta Diop est transformée en une véritable forteresse. Les force de l’ordre ont pris position sur tous les points. Casques vissés sur la tête, armes à la main et boucliers levés, les forces anti-émeutes forment une barrière infranchissable autour du tribunal. Ils guettent le moindre mouvement suspect et le moindre attroupement de foule.  Le message est clair : aucune manifestation ne sera tolérée. « Ils ont reçu des instructions fermes pour éviter tout trouble à l’ordre public », confie un confrère posté à quelques mètres de l’entrée du tribunal.  L’objectif est sans doute de de garantir le bon déroulement de l’audition de Farba Ngom sans interférence extérieure.

Les partisans de Farba Ngom entre colère et frustration

Vers 10h, le cortège de Farba Ngom arrive. Accompagné d’une dizaine de militants scandant « Nugne Farba la gnu beug ! » (On aime Farba). Mais la liesse est de courte durée. Arrivé au rond-point en face de la grande porte de l’Université Cheikh Anta Diop, une pluie de lacrymogène disperse la foule. C’est la panique ! c’est le sauve qui peut.  Dans la foule, les visages sont partagés entre défiance et résignation. Certains militants, venus exprimer leur soutien au Maire d’Agam, peinent à̀ contenir leur frustration. Drapeaux brandis, slogans scandés, une centaine de partisans tentent de se regrouper malgré́ les barrages policiers. « Farba n’est pas un voleur ! » crie un jeune militant, le poing levé́. À ses cotes, d’autres dénoncent ce qu’ils considèrent comme une « instrumentalisation de la justice » contre un rival politique.  « Il a toujours été aux cotes des populations, il a construit des routes, des écoles, des postes de santé. Aujourd’hui, on veut le salir pour des raisons politiques », s’indigne Mariama, une militante de l’APR venue de Keur Massar.  

Mais à̀ chaque tentative de rassemblement, la réponse policière est immédiate. Des sommations sont lancées, obligeant les sympathisants à reculer.  Des militants se barricadent dans le « couloir de la mort » de l’UCAD.  Mais, ils sont vites chargés par les policiers. Ici, c’est la panique. Entre les étudiants et militants, il n’y a pas de distinction.  La confusion règne. C’est le sauve qui peut pour échapper aux gaz lacrymogènes dont la dose est visiblement « puissante ».  Vite, des vigiles de la COUD prennent position pour filtrer l’entrée. Carte étudiant obligatoire pour accéder dans le campus pédagogique.

Les militants de Farba ne renoncent pas. Certains se regroupent sur la rocade Fann Bel-Air à coté du quartier Fass Delorme. Mais les pick-up de la police les poursuivent. Quelques heurts éclatent brièvement, mais la pression des forces de l’ordre dissuade toute escalade.

Des citoyens partagés sur la convocation de Farba Ngom

Si les partisans du député́ dénoncent un acharnement, d’autres citoyens estiment qu’il est temps que la justice joue pleinement son rôle. À quelques mètres du tribunal, un groupe de passants suit la scène avec attention. « C’est une bonne chose que des hommes politiques répondent enfin devant la justice », estime Moussa Guéye, marchand ambulant. « Pendant longtemps, on a eu l’impression que certains étaient intouchables. Aujourd’hui, on voit que les choses bougent », Mbaye Diagne, chauffeur de Car rapide trouvé en face du grand portail de l’UCAD.  D’autres, en revanche, restent sceptiques sur la finalité́ de cette convocation. « Oui, c’est bien de convoquer les politiciens soupçonnes de détournement, mais est-ce que cela va vraiment aboutir ? » s’interroge Soxna Khady Fall, étudiante en communication et médias. « On a vu trop de dossiers enterres après quelques mois», se limite-t-elle à dire.

« Cette convocation marque une étape importante dans la lutte contre l’impunité́ »

À l’intérieur du tribunal, Farba Ngom est reçu par les magistrats du pool judiciaire financier. L’enquête porte sur des soupçons de malversations liées à la gestion de fonds publics. Depuis plusieurs semaines, la rumeur de son audition alimentait les discussions politiques, d’autant plus qu’il est considèré comme un proche de l’ancien président Macky Sall. « Cette convocation marque une étape importante dans la lutte contre l’impunité́ financière », souligne Seynabou Niang, étudiant en droit rencontré sur le couloir de la mort. « Mais il faudra voir si cela débouche sur une réelle mise en accusation ou si c’est simplement un effet d’annonce », analyse-t-elle.

Au-delà̀ du cas de Farba Ngom, cette affaire illustre un climat politique de plus en plus tendu. Depuis l’alternance, plusieurs figures de l’ancien régime sont dans le viseur de la justice. Si certains dénoncent une chasse aux sorcières, d’autres y voient le signe d’une volonté́ de moralisation de la gestion publique.

Pour l’heure, Dakar retient son souffle. L’audition du député́ se poursuit à̀ huis clos, tandis que les forces de l’ordre maintiennent la pression sur les éventuels manifestants. À mesure que les heures passent, l’avenue Cheikh Anta Diop retrouve peu à̀ peu son agitation habituelle. Mais derrière cette apparente accalmie, l’ombre du dossier Farba Ngom plane toujours sur la scène politique sénégalaise.  Vers 17 h, le verdict est tombé ! l’ex -député est placé sous mandat de dépôt.

Letemerair

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