Dans une initiative sans précédent au Sénégal, le député Guy Marius Sagna a soumis à l’Assemblée nationale une proposition visant à accuser l’ancien président Macky Sall de haute trahison devant la Haute Cour de justice. Se basant sur l’article 101 alinéa 1er de la Constitution sénégalaise de 2001 et sur la loi organique modifiée n°2002-10, cette proposition représente un effort pour élucider divers abus financiers présumés de grande envergure.
Dans son argumentaire, Guy Marius Sagna souligne que la haute trahison est la seule infraction pour laquelle un Président de la République peut être poursuivi pour des actes commis durant son mandat. Il précise que cette mise en accusation nécessite une majorité des trois cinquièmes des membres de l’Assemblée nationale pour être validée. Le député met en avant le caractère exceptionnel de cette démarche, tout en soulignant l’importance d’assurer la transparence et la bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques.
Cette demande d’accusation repose sur les conclusions accablantes du rapport de la Cour des comptes, qui révèlent des engagements financiers de l’État atteignant 2 517 milliards de francs CFA, pris sans autorisation parlementaire ni inscription dans une loi de finances. Ces pratiques, réalisées en dehors du cadre légal établi par la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF), sont, selon le député, une violation flagrante du principe de légalité budgétaire.
Le rapport révèle également une utilisation massive et irrégulière des comptes de dépôt au Trésor (SNPE), à hauteur de 2 562 milliards de francs CFA, échappant totalement au contrôle parlementaire. Des manipulations comptables, telles que des rattachements de recettes non conformes, des dépenses non retracées et des opérations extrabudgétaires non reversées, ont également été détectées. Ces pratiques auraient contribué à dissimuler le déficit réel de l’État, estimé à plus de 10 % du PIB pour l’année 2022, alors que les chiffres officiels affichaient un déficit de 6,5 %. De même, la dette publique, officiellement évaluée à 74 % du PIB, serait en réalité proche de 100 %, mettant le pays à risque d’une grave crise financière.
Pour Guy Marius Sagna, ces éléments ne relèvent pas uniquement d’une mauvaise gestion : ils révèlent une volonté délibérée de dissimulation budgétaire et de contournement des institutions républicaines. Ils nuisent à la souveraineté financière du pays et engagent l’avenir des générations futures sans leur consentement.
Le député appelle donc l’Assemblée nationale à utiliser pleinement ses pouvoirs constitutionnels en votant la mise en accusation de l’ancien chef de l’État devant la Haute Cour de justice. Il considère que cette démarche est essentielle pour restaurer la confiance des citoyens dans les institutions et réaffirmer la primauté de la loi et de la responsabilité politique, même au plus haut niveau de l’État.