À l’issue d’une analyse croisée des rapports de ses observatoires de la qualité de l’éducation, des missions de terrain et du projet de Loi de finances initiale (LFI) 2026, la Coalition des organisations en synergie pour la défense de l’éducation publique (COSYDEP) dresse un état des lieux sans complaisance du système éducatif sénégalais. Si des efforts sont notés, l’organisation identifie de lourds défis structurels et appelle à des réformes urgentes, concertées et durables.
En cette fin du premier trimestre de l’année scolaire 2025-2026, la COSYDEP a procédé à une lecture approfondie du contexte éducatif national. Cette analyse met en lumière des efforts en cours, notamment sur certaines problématiques de gouvernance, la gestion de la crise universitaire ou encore la rénovation annoncée du lycée Limamou Laye. Toutefois, l’organisation estime que ces avancées demeurent inachevées face à l’ampleur des défis structurels persistants : déficit criant en personnel enseignant, insuffisances en infrastructures scolaires, manque de matériel pédagogique et d’intrants essentiels.
Deux défis majeurs à relever
La COSYDEP identifie en premier lieu l’inclusion dans l’éducation comme un impératif de justice et d’équité sociales. Selon elle, les réponses actuelles restent fragmentées et insuffisamment coordonnées. Elle appelle ainsi à l’élaboration d’une stratégie nationale concertée, ciblant en priorité les populations les plus vulnérables : enfants des zones enclavées, frontalières et insulaires, jeunes jamais scolarisés ou prématurément déscolarisés, enfants à besoins éducatifs spéciaux, sans oublier les sous-secteurs longtemps marginalisés tels que la petite enfance, l’éducation non formelle et les daaras.
Le second défi majeur concerne la performance globale du système éducatif, marquée par des taux d’échec et de décrochage jugés préoccupants. Pour y remédier, la COSYDEP insiste sur la nécessité de créer un environnement d’apprentissage sain, sécurisé et conforme aux standards de qualité. Elle préconise l’éradication définitive des abris provisoires, la réhabilitation systématique des écoles vétustes, l’extension du réseau scolaire, le renforcement du personnel enseignant et du mobilier, l’amélioration de l’alimentation scolaire ainsi qu’une intégration stratégique et réfléchie du numérique éducatif.
Deux paramètres stratégiques à maîtriser
Au-delà des urgences structurelles, l’organisation attire l’attention sur l’environnement géopolitique régional et international, qu’elle juge de plus en plus contraignant. Les crises politiques et sécuritaires aux frontières du Sénégal, combinées aux risques sanitaires et environnementaux, exigent, selon la COSYDEP, un modèle éducatif plus moderne et résilient. Elle recommande l’intégration des enjeux géopolitiques et sécuritaires dans la gouvernance éducative, à travers des mécanismes de prévention et de gestion des crises, mais aussi des programmes axés sur la paix, la citoyenneté et la cohésion sociale. Cette dynamique devrait s’accompagner, selon elle, d’une accélération de la refondation annoncée du système éducatif, incluant l’adoption d’un code de l’enfant et la révision de la loi d’orientation de l’Éducation nationale, jugée obsolète.
Le second paramètre stratégique concerne le financement de l’éducation, dans un contexte économique marqué par le retrait progressif de certains bailleurs internationaux. Malgré des budgets qualifiés d’historiques pour 2026, l’investissement reste marginal, représentant seulement 7,77 % du budget du ministère de l’Éducation nationale (MEN) et 10,10 % du budget sectoriel. Une situation qui, selon la COSYDEP, limite durablement la capacité de l’État à financer les infrastructures et équipements nécessaires à l’amélioration de la qualité. L’organisation plaide pour des budgets mieux répartis, plus sensibles à la vulnérabilité, une optimisation des ressources existantes et le développement de mécanismes de financement innovants, fondés notamment sur une justice fiscale favorable aux services sociaux de base.
Un contexte sociopolitique à maîtriser
Enfin, la COSYDEP met en garde contre la politisation excessive de l’espace public, qu’elle estime préjudiciable à une prise en charge efficace des enjeux éducatifs. Selon elle, les jeux d’acteurs politiques relèguent au second plan des questions fondamentales de développement économique et social. L’organisation appelle à assainir l’espace social et à replacer l’éducation au cœur des priorités nationales, en protégeant l’école des tensions politiques. Elle estime que le pacte social en construction devrait également engager les acteurs politiques à préserver la stabilité et la cohésion nationale.
Réaffirmant son engagement en faveur d’une éducation publique inclusive, équitable, stable et protectrice, la COSYDEP insiste sur l’importance d’une gouvernance transparente et participative, ainsi que sur la nécessité d’investissements adaptés. Elle rappelle qu’aucune réforme durable ne peut réussir sans un dialogue constructif et une mobilisation collective de l’ensemble des acteurs.
Enfin, la COSYDEP appelle à consolider les acquis et à relever les défis persistants dans un esprit de responsabilité et de partenariat, afin d’assurer un bon dénouement de l’année scolaire. Elle a également adressé ses vœux pour une excellente année 2026 et une participation réussie de l’équipe nationale du Sénégal à la CAN.

