Dans un contexte de refonte du système politique sénégalais, le dialogue national initié actuellement prend un tournant notable. Alors que la majorité des forces politiques répondent positivement à l’appel du chef de l’État, les organisations de la société civile sénégalaise apportent une contribution structurée, ambitieuse et résolument réformatrice. Le Conseil des organisations de la société civile pour les élections (COSCE), l’ONG 3D et le GRADEC, en première ligne, ont présenté des propositions claires organisées autour de cinq axes essentiels. Leur but : repenser le système politique en renforçant la démocratie, les institutions, la justice et l’engagement citoyen.
Une réponse politique positive à l’appel de Diomaye
Lors du Conseil des ministres du mercredi passé, le président Bassirou Diomaye Faye avait fortement encouragé un dialogue inclusif, visant à placer la refonte des institutions au cœur de son projet. Moins d’une semaine plus tard, l’adhésion massive des forces politiques semble valider son approche. À l’exception de quelques entités comme l’Alliance pour la République (APR), Oser l’Avenir, et les figures politiques Alassane Sall et Pape Djibril Fall, l’essentiel des principales forces politiques du pays ont répondu présentes. Cette vaste mobilisation confère une certaine légitimité à l’initiative présidentielle et représente un succès politique pour Diomaye Faye, élu sur la promesse d’un renouveau démocratique.
Une réforme institutionnelle pour rééquilibrer les pouvoirs
Les organisations de la société civile soulignent d’abord la nécessité d’une refonte profonde des institutions. Elles critiquent la concentration excessive des pouvoirs entre les mains de l’exécutif et proposent en réponse un rééquilibrage audacieux. Parmi les mesures phares figurent l’abolition du poste de Premier ministre considéré superflu et une définition plus rigoureuse des pouvoirs présidentiels.
L’Assemblée nationale, souvent jugée faible, devrait se voir attribuer un rôle plus important, incluant des sessions de questions pour le président de la République, pratique déjà courante dans plusieurs démocraties. De plus, on propose de transformer le Conseil constitutionnel en une véritable Cour constitutionnelle, dotée d’une composition pluraliste et indépendante. Cette cour aurait notamment pour mission de gérer les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) introduites par les citoyens eux-mêmes.
Pour une gouvernance électorale transparente et une justice indépendante
Un autre aspect crucial de la refonte concerne la gouvernance électorale. La société civile prône la création d’une Commission électorale nationale indépendante (CENI), jouissant d’une autonomie réelle, tant d’un point de vue organique que fonctionnel. Composée de représentants de la magistrature, de la société civile, des ordres professionnels et d’autres secteurs, cette commission garantirait la transparence du processus électoral. À cela s’ajoute la nécessité de revoir la carte électorale pour la rendre conforme aux réalités démographiques et d’exclure toute implication des membres du gouvernement dans l’organisation des élections.
La justice n’est pas en reste. Les réformateurs réclament une véritable indépendance pour le Conseil supérieur de la magistrature et la dissociation des fonctions de ministre de la Justice et de procureur général. Ils appellent aussi à l’adoption d’un statut clair pour l’opposition et à la dépénalisation des délits de presse. La révision du Code pénal et du Code de procédure pénale est également jugée indispensable pour restreindre les abus en matière de garde à vue et de détention préventive.
Citoyenneté active, transparence et décentralisation
En matière de gouvernance politique, moraliser la vie publique constitue une autre priorité. La société civile plaide pour une loi organique régulant le fonctionnement des partis politiques, exigeant transparence, démocratie interne et respect des règles de financement. Elle propose aussi un plafonnement des dépenses électorales et un organe de contrôle indépendant. Pour éviter la multiplication de partis peu représentatifs, des critères d’audience et de territorialité pourraient conditionner leur reconnaissance légale.
Les citoyens doivent être pleinement impliqués dans la gestion des affaires publiques. Pour ce faire, la société civile suggère l’instauration du référendum d’initiative citoyenne, de pétitions populaires, et la mise en place de mécanismes réguliers de dialogue entre les institutions et les citoyens. Une véritable décentralisation, avec transfert effectif de compétences et de ressources aux collectivités territoriales, est également jugée cruciale pour rapprocher les politiques publiques des réalités locales.
Un moment décisif pour la démocratie sénégalaise
Alors que les contours du nouveau système politique se dessinent, la société civile sénégalaise réaffirme son rôle de gardienne et de force de proposition. Les réformes proposées ne se contentent pas de corriger les dysfonctionnements du passé, elles ouvrent la voie à une démocratie plus équilibrée, plus participative et plus transparente.
En suscitant une large adhésion autour de ce dialogue national, le président Diomaye Faye réussit une première étape politique importante. Reste à traduire ces intentions en actes. Mais une chose est sûre : les fondations d’une refonte sont bel et bien posées avec une grande adhésion de plusieurs formations politiques
El faye