Bilan mitigé pour la diplomatie environnementale en 2024 : les COP sont-elles devenues inutiles ?

Bilan mitigé pour la diplomatie environnementale en 2024 : les COP sont-elles devenues inutiles ?

Une COP29, deux COP16, un traité plastique… Difficile de s’y retrouver tant l’agenda diplomatique pour la planète a été chargé ces derniers mois. L’heure est maintenant au bilan avec, en arrière-plan, une question : les COP seraient-elles devenues inutiles ?

La fin d’année approche, et avec elle l’heure des bilans. Le 14 décembre 2024 a marqué la fin d’un agenda international ultra-chargé sur le volet environnemental. Rien de moins que trois COP étaient au programme : celle sur le climat qui a lieu tous les ans, mais aussi celles sur la biodiversité et contre la désertification, qui ont lieu tous les deux ans. Et c’est sans compter un traité plastique négocié entretemps. Mais ce marathon diplomatique a été largement compliqué par les tensions géopolitiques, liées à l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis et de nombreux autres dirigeants défavorables au développement durable. Si quelques textes ont pu être adoptés, toutes les COP ont achoppé sur la question des financements, et le bilan global est finalement très mitigé. De quoi se poser la question : les COP servent-elles encore à quelque chose ?

« C’est fini ». Susana Muhamad, la ministre de l’Environnement colombienne, a été obligée de suspendre la COP16 de Cali au matin du samedi 2 novembre. Après deux semaines de négociations, et une nuit blanche de prolongations, trop de délégations avaient quitté la salle, le quorum n’était plus atteint. Les pays se sont donc quittés sans parvenir à un accord sur le sujet le plus explosif du rendez-vous : comment porter à 200 milliards de dollars par an les dépenses mondiales pour sauver la nature, dont 30 milliards provenant des pays riches.

Deux ans après la COP15 et l’accord historique de Kunming-Montréal, sorte d’équivalent de l’Accord de Paris pour la biodiversité, les Etats devaient ici s’entendre sur les moyens de mettre en œuvre les objectifs de l’accord : protéger 30 % des terres et mers d’ici 2030, réduire de moitié les risques des pesticides, réduire les subventions néfastes…

La présidence colombienne avait notamment pour feuille de route de créer un nouveau fonds pour la nature, ce à quoi s’opposent les pays du Nord. En douze jours de négociations les positions sont restées figées. Et les 10 heures de négociations supplémentaires, en pleine nuit, n’ont rien changé.

Plusieurs textes ont tout de même pu être adoptés. Les peuples autochtones et les communautés locales ont obtenu d’être représentés via la création d’un nouveau groupe permanent au sein de la convention sur la diversité biologique des Nations unies. Ce qui leur permettra d’avoir un siège à part entière à la table des prochaines négociations.

Un autre texte sur le partage des bénéfices issus de l’utilisation commerciale des séquences génétiques des plantes et des animaux a également été adopté, ainsi qu’une décision importante sur les océans, qui va permettre de faciliter l’identification des zones à protéger en haute mer, dans les eaux internationales.

Pour tenter de trouver, malgré tout, un accord sur les moyens, sans attendre deux ans, les délégations ont déjà prévu de se donner une nouvelle chance du 25 au 27 février 2025 à Rome.

COP29 climat : un accord au goût amer

A la COP29sur le climat à Bakou en Azerbaïdjan, il aura fallu près de 36 heures de prolongation pour que les 197 pays parviennent à un accord… qui ne satisfait personne. Notamment sur la question difficile des financements, au cœur de cette édition : combien les pays riches, responsables du changement climatique, doivent-ils verser aux pays en développement pour les aider dans leur transition et leur adaptation ?

Après deux semaines de négociations complètement bloquées, les pays du Nord ont accepté de tripler leur effort, pour verser 300 milliards de dollars par an à partir de 2030. Très loin de ce qu’espéraient les pays du Sud, qui demandaient au moins le double, et de leurs besoins, estimés à 1 300 milliards de dollars. Ce chiffre a beau être bien présent dans le texte final — tous les acteurs sont invités à y contribuer, aucune contrainte n’y est associée.

Du côté des Occidentaux, la déception vient de leur échec à faire évoluer l’architecture de la finance climat. La liste des contributeurs notamment n’a pas évolué, alors que beaucoup espéraient voir la Chine, la Corée du Sud ou des pays du Golfe l’intégrer.

« Les questions des financements amènent des postures très figées », observe Céline Kauffmann, directrice des programmes de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI). Les lignes de démarcation entre le Nord et le Sud ne bougent pas beaucoup, COP après COP. Même si des fractures plus subtiles émergent au-delà des COP, notamment entre les pays pétroliers et les autres.

Mais ce blocage sur les questions financières a pollué toutes les autres, au premier rang desquels l’atténuation. Pour la première fois l’année dernière, un objectif de « transition loin des énergies fossiles » avait été écrit noir sur blanc. Cette année à Bakou, le terme est redevenu tabou. Un texte qui devait mettre en œuvre cette sortie progressive des énergies fossiles n’a pas été adopté au dernier moment, après avoir été vidé de sa substance sous l’assaut des pays producteurs de pétrole, emmenés par l’Arabie saoudite.

Rare bonne nouvelle, la COP29 aura quand même permis d’adopter les dernières règles de l’article 6 de l’Accord de Paris, 9 ans après, au sujet des crédits carbone. Le cadre est maintenant posé pour un marché centralisé, sous l’égide des Nations Unies, pour des échanges de crédits entre pays mais aussi entre Etats et entreprises privées.

Traité plastique : échec et prolongation

Entre deux COP, les négociations pour un traité plastiqueen Corée du Sud devaient aussi se conclure, avec un dernier round de négociations du 25 novembre au 1er décembre. Mais les 170 pays négociateurs se sont quittés sans rien signer. Ils se sont uniquement accordés sur une poursuite en 2025 des débats démarrés en 2022.

La soixantaine de pays de « la Coalition des hautes ambitions » (dont fait partie la France), qui voulait intégrer des objectifs de réduction de la production de plastique, s’est heurtée à un petit groupe de pays producteurs de pétrole comme la Russie, l’Iran, le Koweït ou l’Arabie saoudite, fermement opposé à tout objectif contraignant, uniquement d’accord pour des cibles de recyclage.

COP16 désertification : échec des négociations

Jamais deux sans trois… L’année s’est terminée avec la moins connue des COP, la COP16 désertification à Riyad, en Arabie saoudite, la première quinzaine de décembre. Et là encore, le bilan est décevant. Les enjeux sont pourtant encore colossaux : 40 % des terres émergées sont menacées par la dégradation des sols. Selon un rapport récent de l’ONU, les sécheresses coûtent déjà 307 milliards de dollars par an dans le monde.

Mais les négociations se sont achevées dans la nuit du vendredi au samedi 14 décembre, sans accord sur la mise en place d’un protocole contraignant de lutte contre les sécheresses. Pas, non plus, d’accord sur un fonds associé, qui était ardemment réclamé par les pays africains.

Faute d’entente lors des négociations formelles, le Partenariat mondial de Riyad pour la résilience face à la sécheresse a tout de même permis de mobiliser plus de 12 milliards de dollars pour soutenir et rendre plus résilients 80 des pays les plus vulnérables face à la sécheresse.

Mais la convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification estime qu’il faudrait au moins 2 600 milliards de dollars d’investissements d’ici 2030 pour restaurer plus d’un milliard d’hectares de terres dégradées. Un futur cadre mondial sur la sécheresse sera de nouveau sur la table des négociations en 2026 pour la COP17 en Mongolie.

Les COP encore utiles ?

« Décevante », « échec des négociations », « accord au goût amer »…

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