Pétrole et gaz : le Pr Thierno Thioune plaide pour une stratégie centrée sur l’industrialisation

Pétrole et gaz : le Pr Thierno Thioune plaide pour une stratégie centrée sur l’industrialisation

Pour le professeur Thierno Thioune, le Sénégal doit impérativement éviter les dérives observées dans plusieurs pays producteurs d’hydrocarbures. Il cite le Nigeria, premier producteur du continent mais dont 70 % de la population vit encore dans la pauvreté, comme un exemple à ne pas suivre. À l’inverse, il met en avant les démarches du Ghana ou du Botswana, qui ont su instaurer une gouvernance rigoureuse autour de leurs ressources naturelles. Selon lui, la gestion prudente adoptée par le Sénégal est un bon point de départ, mais elle doit s’accompagner d’une vision stratégique solide afin de transformer ces ressources en levier de développement et non en fardeau macroéconomique.

Thioune exprime de fortes réserves quant à la création d’un fonds intergénérationnel, jugeant ce mécanisme inadapté à un pays en phase d’émergence. « Garder des ressources dans un fonds qui rapportera peu, alors que l’économie souffre de déficits structurels, ce n’est pas optimal », estime-t-il. Il recommande plutôt d’investir ces revenus directement dans l’industrialisation, la modernisation de l’agriculture et la création d’emplois, afin de renforcer durablement la base productive nationale.

L’économiste insiste également sur la nature épuisable du pétrole et du gaz, rappelant que leur contribution au PIB demeure encore marginale. La véritable opportunité, dit-il, réside dans la diversification économique. Sur le plan énergétique, il identifie un impact immédiat : la conversion des centrales au gaz, qui pourrait réduire les coûts de production de 30 à 50 francs par kilowattheure et ramener le prix de l’électricité à environ 100 francs, améliorant à la fois le pouvoir d’achat et la compétitivité industrielle.

Il appelle enfin à une lucidité sur les renégociations contractuelles, estimant les marges limitées, et juge indispensable la construction d’une seconde raffinerie entre 2027 et 2029 pour accompagner la croissance démographique et soutenir une stratégie industrielle ambitieuse. Selon lui, la priorité nationale doit être claire : utiliser les revenus des hydrocarbures pour créer de la valeur ajoutée et bâtir une économie résiliente.

El Faye

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