Le Sénégal est confronté, depuis l’indépendance acquise en 1960, à un problème de gouvernance économique. L’indépendance octroyée par la France, ancienne ou puissance colonisatrice ne s’est pas traduite par une levée de sa mainmise sur les leviers économiques du pays. Contrairement au système colonial anglais basé sur le retrait systématique de ses anciennes colonies et la méthode du faire faire, la France a persisté dans son refus de se retirer des pays colonisés, invoquant l’impossibilité de laisser ces pays se gouverner tout seul. Sarrogeant le droit de bénéficier en toute priorité des ressources et des biens produits à partir de ces pays, la France a développé une stratégie d’accaparement systématique de tout ce qui, comme dans d’autres pays, asiatiques en particulier, aurait pu permettre à l’Afrique d’engager sa croissance et son développement. Tous les phénomènes qui ont eu cours dans l’histoire des pays dits francophones d’Afrique résultent de la non maîtrise de leur économie.
Problèmes politiques avec les instabilités et les coups d’État répétitifs, atteintes aux institutions et aux droits de l’homme, remise en cause de la démocratie, tentative d’accaparement de l’espace public, foisonnement de forces centrifuges contribuant à l’instabilité. Les mouvements de rebellions, les conflits ethnico religieux, les velléités de séparatisme, tous ces phénomènes sont engendrés par l’effondrement de nos économies. C’est dire que notre principal problème est d’abord économique qui impacte sur toutes les autres questions politiques et sociales. Avec plus de 300 partis politiques et presque autant de syndicats, une presse exponentielle sans ancrage sur l’économie réelle, des mouvements politico-sociaux s’accrochant sur les offres du pouvoir comme fonds de commerce, le Sénégal navigué toujours en eaux troubles. Le reconnaître, c’est comprendre que pour régler les problèmes politiques et sociaux, il faut d’abord affronter les problèmes économiques.
Si le Premier ministre Ousmane Sonko insiste sur la primauté des questions économiques, c’est sans doute moins pour laisser l’exclusivité du dialogue aux seules questions de gouvernance économique que de rappeler la simplicité du problème mais aussi la complexité des réponses qu’il engendre. Il va de soi que le dialogue convoqué devrait engager toutes les interpellations qui traversent notre société. Aucun sujet ne devrait être laissé en rade ni aucun secteur de notre société. Mais, il faudrait engager la problématique dans une approche inclusive et participative avec comme fil conducteur la question majeure de l’économie Sénégalaise et de sa gouvernance. Réglons donc les questions économiques par l’appropriation souveraine des leviers économiques pour engager notre pays dans la voie de son véritable développement.
Mamadou Kassé
Journaliste