Spoliation foncière à grande échelle à Mbane: Un scandale dénoncé par Dr. Mbaye Cissé

Spoliation foncière à grande échelle à Mbane: Un scandale dénoncé par Dr. Mbaye Cissé

Un vaste scandale foncier secoue la vallée du fleuve Sénégal, où 8.000 hectares de terres ont été attribués dans des conditions contestées à l’homme d’affaires Tahirou Sarr. Dénoncée par Dr. Mbaye Cissé et plusieurs personnalités, cette affaire met en lumière une spoliation présumée remontant aux années 1980 et impliquant des acteurs influents. Les violations des lois foncières, l’impact sur les communautés locales et l’accaparement massif des terres agricoles par des multinationales posent de graves questions sur la gouvernance foncière au Sénégal. Face à ces dérives, des voix s’élèvent pour exiger une réforme urgente et la restitution des terres aux agriculteurs locaux.

Dans une affaire foncière qui s’étend sur plusieurs décennies, un titre foncier de 8.000 hectares attribué à Tahirou Sarr soulève des interrogations quant à la légalité du processus d’acquisition. Selon Dr. Mbaye Cissé, spécialiste en études de droit comparé et président du Réseau de la Vallée contre l’Accaparement des Terres et la Dégradation de l’Environnement (REVATED), cette assiette foncière provient d’une spoliation illégale initiée sous la présidence d’Abdou Diouf.

Une acquisition aux contours douteux

Dans les années 1980, Abdou Diouf fit immatriculer au nom de l’État du Sénégal 8.000 hectares de terres, en violation de la loi n° 64-46 du 17 juin 1964 relative au Domaine National. Cette parcelle fut ensuite octroyée à la société OSBI, spécialisée dans l’agriculture et l’élevage, dont Cheikh Hamidou Kane était le président du conseil d’administration, souligne Dr. Mbaye Cissé. « Malgré une mise en bail emphytéotique (N°320/BS), les terres restèrent inexploitées. Par la suite, Cheikh Hamidou Kane hypothéqua le terrain auprès de la Banque des Institutions Mutualistes de l’Afrique de l’Ouest (BIMAO) pour obtenir un prêt destiné à un projet agricole qui ne vit jamais le jour. Faute de remboursement, la BIMAO saisit et vendit le terrain pour réaliser sa garantie hypothécaire. La Société Financière d’Intermédiation et de Commerce (SOFICO), appartenant à Tahirou Sarr, racheta alors le crédit pour 2 milliards de FCFA », a-t-il rappelé.

Ce bail fut ensuite adjugé à SOFICO, tandis que la valeur vénale du terrain fut estimée à 48 milliards de FCFA par les experts immobiliers, soit 600 FCFA le mètre carré. Face à cette situation jugée illégale, plusieurs personnalités, dont Dr. Aliou Diack (ancien président du conseil rural de Mbane), Yassine Fall (ministre de l’Intégration Africaine et des Affaires étrangères) et Dr. Mbaye Cissé, ont dénoncé cette attribution et demandé son expropriation pour cause d’utilité publique.

Impact sur les populations et l’agriculture locale

Selon Dr. Mbaye Cissé, cette affaire ne concerne pas seulement une question de légalité foncière, mais aussi les droits des populations locales. En effet, la zone est habitée par plusieurs villages traditionnels Peuls, Toucouleurs, Wolofs et Maures, vivant principalement de l’agriculture et de l’élevage. La spoliation de ces terres menace directement leurs moyens de subsistance. Parmi les localités concernées figurent Ndiack Fall, Ndoumbalene, SAM-SAM, Temeye-Toucouleur, Mapodji et bien d’autres.

Cette affaire, dit Dr. Mbaye Cissé, s’inscrit dans une problématique plus large d’accaparement des terres agricoles dans la vallée du fleuve Sénégal. De nombreuses entreprises multinationales y ont acquis d’immenses superficies, souvent dans des conditions opaques. Parmi elles, la Compagnie Sucrière Sénégalaise (CSS) possède 26.000 hectares, dont 10.000 sont exploités. African Agriculture, une société liée à Frank Timis, a obtenu 20.000 hectares, dont 5.000 à Fasse Ngom, sans qu’aucune production significative ne soit réalisée. Selon Dr. Mbaye Cissé, la société West Africa Farm, implantée à Diama Yalar, exporte la totalité de sa production d’oignon vert vers l’Angleterre, tandis que Seneg India, rebaptisée Suami Agri, continue d’acquérir des terres dans des conditions controversées.

Par ailleurs, un autre scandale foncier implique Abdou Hafiz Fakih, détenteur illégal de 1.700 hectares transférés à son fils Rabih Fakih, qui tente actuellement de vendre cette assiette foncière à Suami Agri. Cette tentative a été dénoncée dès 2010 par Dr. Aliou Diack et plus tard par Yassine Fall. Dr. Mbaye Cissé souligne que cette situation illustre l’impunité qui entoure l’accaparement des terres au Sénégal.

Une réforme foncière urgente

Face à ces enjeux, Dr. Mbaye Cissé et d’autres militants demandent la publication des baux emphytéotiques attribués aux multinationales et un audit des entreprises d’agrobusiness implantées dans la région. Ils estiment que l’autosuffisance alimentaire du Sénégal est compromise tant que ces terres ne sont pas restituées aux agriculteurs locaux.

Dr. Mbaye Cissé insiste sur le fait que l’administration actuelle, sous la présidence de Bassirou Diomaye Faye, est appelée à agir pour rétablir la justice foncière et garantir que les terres arables restent au service du développement local. La publication des contrats fonciers, l’examen des pratiques des multinationales et l’annulation des baux irréguliers sont des mesures essentielles pour restaurer la souveraineté agricole nationale.

Ainsi, la question foncière dans la vallée du fleuve Sénégal illustre les enjeux plus larges de gouvernance et de justice sociale, où l’intérêt des populations doit primer sur les intérêts économiques de quelques-uns. Dr. Mbaye Cissé rappelle que « seule une réforme foncière globale pourra garantir l’accès des agriculteurs locaux aux ressources nécessaires pour assurer la sécurité alimentaire du pays ».

la redaction

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